Art nouveau

En France, l’Art nouveau émerge dans le contexte d’une IIIe République qui s’affirme et de la révolution industrielle en pleine expansion.

Statuette Loïe Fuller
Fernand Massignon, dit Pierre Roche (1855-1922)
Paris, création du modèle, vers 1894
E. Gruet, fondeur
Paris, édition, vers 1901
Bronze, socle en marbre noir
H. : 50,5 cm - l. : 28,5 cm - Prof. : 30 cm
Don de Monsieur Louis Massignon et sa sœur en souvenir de leur mère, 1931
Inv. 27955
© MAD, Paris / Jean Tholance

On cherche des formes originales et de nouveaux matériaux de construction, c’est le triomphe du fer et du verre. L’Exposition universelle de 1900, événement emblématique du mouvement, connaît un immense retentissement. L’Art nouveau concerne tous les domaines artistiques : peinture, sculpture, arts graphiques, architecture et arts décoratifs. Il prône l’unité de l’art ou un « art total », mettant à mal les hiérarchies anciennes entre les arts mineurs et majeurs. Les artistes cherchent à offrir la même qualité à un objet produit en série qu’à une pièce unique. L’Art nouveau, d’un style facilement reconnaissable aujourd’hui, a été d’une relative courte durée de la fin des années 1880 à 1910.

Contexte / influence

Vase « Cascade japonaise »
François-Eugène Rousseau (1827-1891)
Paris, 1884
Verre soufflé, doublé, modelé à chaud, gravé à la roue
H. : 17 cm - Diam. max. : 16 cm - Diam. de l’ouverture : 8,5 cm
Achat à l’artiste à la suite de l’Exposition de l’UCAD de 1884
Inv. 628
© MAD, Paris / Jean Tholance

On peut voir dans le mouvement Art and Crafts qui se développe en Angleterre vers 1860 les fondements de l’Art nouveau, puisqu’il cherchait un « art dans tout » et dans l’utile. L’Art nouveau, courant international, s’exprime de différentes manières selon ses multiples foyers d’émulation et prend différentes appellations selon les pays : « Art Nouveau » en France, « nieuwe Kunst » aux Pays-Bas et en Belgique, « Jugendstil », « Secession » en Europe centrale, « Modernismo » à Barcelone. Néanmoins, tous cherchent à s’affranchir des références au passé et rompre avec la symétrie. Les artistes sont également fortement influencés par les arts du Japon, tant par la technique que par les motifs. Siegfried Bing, marchand et collectionneur, est l’un des protagonistes importants, notamment par l’ouverture de sa boutique « la maison de l’Art Nouveau », qui donna plus tard le nom au mouvement.

Formes

Rampe d’escalier [Monnaie-du-pape]
Louis Majorelle (1859-1926), décorateur
Majorelle frères, ébéniste
Jean Keppel, ferronnier
Nancy, création du modèle, 1903, fabrication, vers 1904
Montant en fer forgé, rampe et décor en acier poli, tige et monnaies du pape en bronze doré, départ de rampe en laiton, soubassement en bois peint façon pierre
H. : 85 cm - L. : 210 cm
Achat Majorelle frères, 1904
Inv. 11318
© MAD, Paris / Jean Tholance

Caractérisée par des formes inspirées de la nature, la ligne est souple, au point de la nommer « coup de fouet » pour l’Art nouveau franco-belge. Bien que les artistes adoptent différentes visions plus ou moins rationalistes, d’une ligne simple à la copie stricte de motifs végétaux, ils portent tous une attention particulière à la nature, par l’observation et l’étude d’ouvrages botaniques. Certains copient réellement les motifs du répertoire végétal, floral, aquatique et d’autres s’en inspirent simplement comme structure, simplifiée et stylisée. Quant à l’école de Glasgow, plus géométrique, elle est à l’origine de l’Art déco européen.

Ornements

Affiche « Grand théâtre de l’exposition, Palais des enfants, ballet, opéra comique... »,
Jules Chéret
1889
Papier, lithographie couleur
H. : 60,5 cm - L. : 42 cm
Inv. 10570.1
© MAD, Paris / Cyrille Bernard

Issu du répertoire naturaliste, le mobilier peut prendre la forme même de la plante (guéridon nénuphar, chaise aux ombelles) ou être agrémenté par la marqueterie ou la sculpture de fleurs (iris, primevères, coquelicots, gui) ou encore de petites bêtes (papillons, libellules). La figure féminine a inspiré également les artistes dont Alphonse Mucha et Jules Chéret. René Lalique, lui, la transforme en fée ou en sirène pour ses bijoux.

Matériaux

Vitrail « Le Printemps » (détail)
Eugène Grasset (1845-1917), carton
Félix Gaudin (1851-1930), exécution
Paris, 1894
Verre et plomb
H. : 298 cm - l. : 136 cm
Achat, 1894
Inv. 8003
© MAD, Paris / Jean Tholance

Malgré la volonté de changement, les artistes reviennent aux techniques dites traditionnelles tels que la reliure, la tapisserie ou le vitrail et à des pratiques artisanales propres à leur région. Les artistes cherchent de nouveaux effets, et notamment dans le travail du verre. Émile Gallé est l’inventeur de la marqueterie de verre. La maison Daum dépose un brevet pour un « nouveau mode de décoration dit décoration intercalaire à grand feu pour cristaux, verrerie etc. ». Les boiseries et les meubles gardent la couleur naturelle du bois qui est souvent de l’acajou, du noyer ou du platane. Le bois, le plus souvent travaillé en massif, est finement sculpté.

Invention / création (meubles nouveaux)

Buffet « Les vendanges »
Émile Gallé (1846-1904)
Nancy, vers 1904
Noyer mouluré et sculpté, marqueterie de bois polychromes, bronze ciselé et doré
H. : 175 cm - l. : 140 cm - Prof. : 57,5 cm
Inv. 41820
© MAD, Paris / Jean Tholance

Plus que l’invention à proprement parler de nouveaux meubles, on doit à l’Art nouveau la diffusion de concept « d’ensemble ». Le mobilier est cohérent et complet : chaise, canapé, table. Le buffet peut même être inclu dans le décor des boiseries. On met en valeur les sculptures sur de hautes sellettes qui font leur apparition à la fin du siècle. Tout est prétexte à ornement : les balcons, les grilles, les rampes d’escaliers s’embellissent de motifs végétaux. Les fenêtres se parent de vitraux colorés, comme les façades se couvrent de céramiques colorées.

  • Armoire

    Hector Guimard (1867-1942)
    Paris, vers 1903
    Poirier sculpté ; bronze ciselé et doré
    H. : 252 cm - L. : 220 cm - Prof. : 67 cm
    Don de Madeleine Pezieux au nom de Madame Léon Nozal, 1937
    Inv. 32646
    © MAD, Paris / Jean Tholance

    Cette armoire fait partie d’un ensemble mobilier provenant de la chambre à coucher de l’hôtel Nozal, qu’Hector Guimard construisit de 1904 à 1906 à Paris. Peu connu et mal documenté car détruit dès 1957, l’hôtel Nozal reste l’une des grandes constructions de Guimard dont il pense entièrement le décor et l’aménagement intérieur. Réalisé en poirier ciré, son décor sculpté évoque une flore stylisée aux lignes fines et courbes qui deviennent la signature du style Art nouveau.

  • Guéridon

    Louis Majorelle (1859-1926)
    Nancy, vers 1902
    Acajou, placage de « bois de serpent » de Guyane, bronze ciselé et doré
    H. : 85 cm - L. : 95 cm - Prof. : 95 cm
    Achat à l’artiste au Salon des artistes français de 1902
    Inv. 10317
    © MAD, Paris / Jean Tholance

    « Ne remarquez-vous pas que ce superbe guéridon trilobé, envoi de M. Majorelle, où les tons profonds du bois s’éclairent des reflets dorés du bronze, est l’apothéose du nénuphar ? » Ce guéridon, présenté au Salon de la société des arts français en 1902, adopte pour le plateau la forme même d’une feuille de nénuphar recourbée sur le pourtour, reposant sur un double piétement tripode, souligné par les fleurs de nénuphar en bronze doré. Les formes naturelles stylisées et les courbes sont caractéristiques du style Art nouveau.

  • Chaise aux ombelles

    Émile Gallé (1846-1904)
    Nancy, 1904
    Hêtre mouluré, sculpté, ajouré ; garniture en velours
    H. : 95 cm - L. : 95 cm - Prof. : 95 cm
    Don de Paule Chardin au nom de sa mère, Madame Veuve Chardin, 1968
    Inv. 41825
    © MAD, Paris / Jean Tholance

    Émile Gallé fut chargé de la décoration intérieure de l’hôtel particulier d’Édouard Hannon, riche ingénieur belge. La chaise fait partie d’un mobilier de salon entièrement décliné autour du motif de l’ombelle, ensemble de petites fleurs réunies en plusieurs groupes formant une sphère. Grand représentant de l’École de Nancy et de l’Art nouveau, Gallé puise son inspiration dans la nature, toutefois, le motif floral ici, n’est pas un élément décoratif mais bien un élément structurel et vient donner la forme du dossier, cherchant à créer un nouveau répertoire de forme.

  • Horloge de parquet

    Hector Guimard (1867-1942)
    Paris, vers 1910
    Chêne, cuivre martelé et repoussé, bronze
    H. : 95 cm - L. : 48 cm - Prof. : 43 cm
    Don Adeline Guimard, 1948
    Inv. 36080
    © MAD, Paris / Jean Tholance

    Guimard, grand protagoniste de l’Art nouveau parisien dont le fer de lance était l’unité de l’architecture, du mobilier et du décor, a établi en 1909 son foyer et son cabinet d’architecte rue Mozart à Paris, d’où provient cette pendule. Le vocabulaire naturaliste inspiré des plantes propre à l’Art nouveau, est sculpté plus au moins en relief dans le bois et finement incisé dans le cuir du centre du boitier. Les lignes ondoyantes, rythmées par un mouvement sinueux, évoque une plante grimpante.

  • Lustre à douze lumières

    Émile Gallé (1846-1904)
    Nancy, vers 1904
    Verre soufflé, doublé, gravé à l’acide, monture en fer forgé
    H. : 134 cm
    Don de Henri Chardin, Paule Chardin, Arlette Thery et Georgette Delmay, en souvenir de leur mère, Madame Denyse Hannon-Chardin, fille d’Édouard Hannon, 1968
    Inv. 41826
    © MAD, Paris

    Émile Gallé, artiste polymorphe qui travaillait autant le verre, la céramique et le bois, emprunte encore une fois le motif de la « Berce des prés », fleur ombellifère que l’artiste ne cesse de décliner jusqu’à la fin de sa vie. On la retrouve en motif sur le verre ou sculpté en bronze. Les bras de lumière sont formés par les tiges des fleurs qui s’éclosent en petite coupole de verre, retenus au sommet par un large bouquet de feuilles.