Années 1940-1950

Le nom de « Trente Glorieuses » donné par Jean Fourastié aux années 1945-1975 couvre les trois décennies durant lesquelles la société française passe de la reconstruction à un accès généralisé à la consommation et aux loisirs.

Voiture à pédales Citroën DS
ToysToys, Fabricant
Italie, 2000
Plastique
L. : 118 cm - l. : 50 cm - H. : 41 cm
Inv. 2001.41.1
© MAD, Paris / Jean Tholance

Les deux décennies de l’après-guerre se caractérisent par un changement rapide de mode de vie et une modernisation profonde de l’habitat et des infrastructures. Portée par l’essor économique, la jeune génération de designers des années 1950 tourne ses regards vers les pays qui incarnent la modernité, aux premiers rangs desquels les États-Unis mais également la Scandinavie. En France, dynamisme et modernité s’incarnent dans l’industrie automobile. Emblématique de cet essor, la DS, créée en 1955 par Citroën, devient une voiture mythique, véritable « déesse » des temps modernes sous la plume de Roland Barthes.

Contexte

Affiche de l’exposition « Formes utiles : union des artistes modernes : Musée des Arts décoratifs. »
Nathan (Jacques Garamond, dit), affichiste
France, 1949
Papier, lithographie couleur
H. : 58 cm - l. : 40 cm
Inv. 2003.198.57
© Adagp, Paris © Photo : MAD, Paris / Jean Tholance

En matière de mobilier, le goût des pièces uniques et des matériaux traditionnels perdure. Après neuf ans d’interruption, le Salon des Arts Ménagers rouvre ses portes au Grand Palais en 1948. Le mobilier de série est présenté dès 1949 dans la section « Le foyer d’aujourd’hui » qui va devenir la vitrine de tous les jeunes designers désirant voir leurs meubles produits en série. La même année l’exposition « Formes Utiles », émanation de l’U.A.M., se tient pour la première fois au musée des Arts décoratifs et ensuite au Salon des Arts Ménagers.

À l’inverse des pays scandinaves, des États-Unis et de l’Italie, la France développe lentement une production de meubles modernes, produits en série pour le marché international. Cependant, stimulées par l’émergence de jeunes talents, de nombreuses maisons d’édition voient alors le jour en France. Celles-ci vont favoriser l’apparition d’un mobilier nouveau.

Bureau « CM 141 »
Pierre Paulin (1927-2009)
France, 1954
Édition Thonet, France
Stratifié multipli chêne, tube et tôle d’acier peint
H. : 72 cm - L. : 129 cm - Prof. : 64 cm
Dépôt Fonds national d’art contemporain, 2001
Inv. FNAC 970976
© MAD, Paris / Jean Tholance

À l’étranger, le travail suivi et régulier de designers au sein des mêmes entreprises est la clé de productions innovantes. Les États-Unis et la Scandinavie deviennent synonymes d’une modernité enviée et leurs grands éditeurs (Knoll, Hermann Miller, Artek …) sont en France des modèles à suivre. Parallèlement, le goût de la décoration reste vivace en France et Jean Royère enchaîne les chantiers dans lesquels il déploie son goût pour les lignes courbes synonymes de confort.

Formes et matériaux

Lampadaire « M1 »
Joseph André Motte (1925-2013)
France, 1958
Édition Pierre Disderot
Bois verni, laiton doré, plexiglas
H. : 123 cm - l. : 30 cm
Achat grâce au mécénat de Moët Hennessy de la Société d’Organisation Culturelle, 2013
Inv. 2013.53.1
© MAD, Paris / Jean Tholance

Dans nombre de mobilier courant produit par de petits ateliers, un style post Art déco perdure. Souhaitant combattre celui-ci, la jeune génération s’appuie sur de nouvelles donnes. Adapté aux petites surfaces et à un nouvel art de vivre, un mobilier fonctionnel aux formes simples voit le jour, emmené par une élite de designers. Avec des matériaux comme le Formica, le contreplaqué ou le verre, les designers cassent les codes, autant du mobilier bon marché que du mobilier de style très répandus en France. Ce faisant, ils proposent un renouvellement des formes et des typologies du mobilier et des accessoires de la maison. Les lignes souvent orthogonales de leurs propositions intègrent alors les problématiques propres à ces années (gain de place, multifonction, mobilité, entretien facile, incursion de la télévision…).

Fauteuil « Soleil »
Janine Abraham (1929-2005)
Dirk Jan Rol (né en 1929)
France, 1958
Édition Rougier
Rotin
H. : 69 cm - l. : 94 cm - Prof. : 90 cm
Achat grâce au mécénat de M. Placido de Arango Jr. par l’intermédiaire des Friends of the Musée des Arts Décoratifs, 2010
Inv. 2010.119.1
© MAD, Paris / Jean Tholance

Il n’existe pas de choix spécifique de matériaux durant cette période. Les créateurs utilisent indifféremment les matériaux traditionnels comme le bois, le cuir, le rotin mais également les dérivés du bois (contreplaqué, lamellé-collé) ainsi que les matériaux industriels (aluminium, acier…) ou ceux de la chimie moderne (matières plastiques, polyester armé de fibres de verre).

  • Meuble TV-tourne-disque-bar

    Antoine Philippon (1930-1995) et Jacqueline Lecoq (née en 1932)
    France, 1958/1959
    Formica post-formé, acier chromé, merisier, laiton
    H. : 96 cm - L. : 340 cm - Prof. : 60 cm
    Don Antoine et Jacqueline Philippon, 1998
    Inv. 998.239.1
    © Antoine Philippon / Jacqueline Lecoq © Photo : MAD, Paris / Jean Tholance

    Antoine Philippon et Jacqueline Lecoq offrent un bel exemple du renouvellement des typologies de mobilier qui s’opère à la fin des années 1950 avec ce meuble multifonction. Ce meuble répond aux besoins de place et à la généralisation de la télévision dans les foyers. Utilisant un matériau comme le Formica, le duo de créateurs rompt avec les codes du mobilier traditionnel qui prévalait jusque-là. Antoine Philippon et Jacqueline Lecoq contribuent ainsi à convertir leurs contemporains au mobilier moderne, fonctionnel, adapté par ses formes et ses matériaux à un nouveau mode de vie.

  • Bureau à abattant avec porte-documents

    Jacques Adnet (1901-1984)
    France, vers 1950
    Simili cuir, laiton
    H. : 100 cm - L. : 93 cm - Prof. : 55 cm
    Achat grâce au mécénat de Moët Hennessy et de la Société d’Organisation Culturelle, 2010
    Inv. 2010.59.1
    © Adagp, Paris © Photo : MAD, Paris / Jean Tholance

    Ambassadeur du goût français, Jacques Adnet est, par ce bureau, fidèle aux préoccupations de rationalisme et de fonctionnalité qui règnent dans l’industrie du meuble dans l’immédiat après-guerre. Adepte de techniques raffinées, il porte une attention particulière à la perfection des formes et à la qualité des matériaux utilisés (laiton et simili cuir).

  • Chauffeuse Antony

    Jean Prouvé (1901-1984)
    France, vers 1954
    Tôle et tube d’acier laqués, contreplaqué de hêtre
    H. : 86 cm - L. : 42 cm - Prof. : 68 cm
    Don du CROUS de l’Académie de Versailles, 2002
    Inv. 2002.69.4
    © Adagp, Paris © Photo : MAD, Paris / Jean Tholance

    Dans l’après-guerre, la France cherche à combler son déficit en logements et équipements universitaires. Jean Prouvé remporte le concours d’ameublement de la cité universitaire Jean-Zay d’Antony et dessine spécialement un modèle de siège en contreplaqué moulé dont la ligne souple prouve que l’économie de moyen et la fonctionnalité du mobilier n’enlèvent rien à une certaine recherche formelle. Cette chaise basse s’apparente à une chauffeuse qui devient une typologie très en vogue à cette époque.

  • Applique Liane

    Jean Royère (1902-1981)
    France, 1953
    Fer patiné, rhodoïd
    H. : 250 cm - L. : 240 cm
    Achat grâce au Fonds du Patrimoine, 2002
    Inv. 2001.128.1
    © DR © Photo : MAD, Paris / Jean Tholance

    Jean Royère développe son goût de l’ornementation à partir des matériaux courants dans les années 1950 et 1960. Le tube de métal devient une ligne ondulée et participe à son répertoire décoratif. La fonction d’éclairer est sublimée par cette forme inspirée de la nature.

  • Horloge murale Ball clock

    George Nelson
    H. : 33 cm - L. : 33 cm - Prof. : 5 cm
    © MAD, Paris / Laurent de Commines

    Pionnier du design moderniste américain, George Nelson, architecte et théoricien du design contribue à instaurer dès les années 1940, un environnement nouveau au bureau comme à la maison ; au-delà d’être à l’initiative de l’innovant concept, celui du mur de rangement, il conçoit des formes à forte présence visuelle et graphique, simples mais affirmées. Ball Clock égrène la mesure du temps à l’aide de l’aiguille des heures surmontée d’une flèche et de celle des minutes coiffée d’une ellipse. Les douze rais métalliques terminés par des boules colorées, le disque central qui dissimule le mécanisme attestent d’une nouvelle esthétique moderne, dont il est un des principaux porte-parole.