Au début du XXIe siècle, la mondialisation de l’économie favorise le développement du design. Dans le monde industrialisé, la valeur du design est de plus en plus reconnue dans les entreprises de toutes tailles et de toutes spécialités.
Une profonde identité des marques renforce les collaborations fortes entre entreprises et designers. Le grand public devient adepte de design sans même connaître le nom des designers. Ce qu’on a pu appeler le design de la Silicon Valley est particulièrement emblématique de ce phénomène. Chez Apple, par exemple, cette stratégie, débutée avant les années 2000 et rencontre un succès exemplaire. Parallèlement à ce design tourné vers l’objet, se développe une conception du design tourné vers la recherche ou d’autres disciplines. La cocréativité du Design Thinking tout comme l’apparition du design culinaire ou du design sonore sont symptomatiques de cet élargissement.
Contexte
Le début du XXIe siècle amorce un changement dans l’acception du mot design. La vision d’un design conçu comme orchestration des formes et des fonctions est depuis plusieurs années largement remise en cause. Depuis les années 1980 les Italiens ont ouvert la voie mais le XXIe siècle voit les contours du design devenir de plus en plus lâches. Dans le même temps, des pays comme l’Afrique, l’Inde ou les pays d’Amérique du sud – que l’on n’associait pas jusque-là au design – interviennent sur la scène internationale même si ils restent minoritaires.
Formes et matériaux
La création d’objets fonctionnels conçus pour un usage courant connaît un renouvellement avec l’arrivée de designers comme les frères Bouroullec qui vont mettre leur talent au service de nombreuses maisons d’édition. On assiste également à l’arrivée de maisons d’édition de plus petite taille, comme Moustache, qui aident à l’éclosion de toute une jeune génération. Se démarquant fortement d’un design « ordinaire », la dimension ostentatoire et humoristique se répand chez certains designers comme Jaime Hayon ou les frères Campana, pour ne citer qu’eux. Parallèlement à l’édition en grande série, certains designers préfèrent conduire leur travail avec des galeries pour développer des pièces exceptionnelles par leurs dimensions, leurs matériaux et leur conception.
Dans ce paysage qui se diversifie, la porosité avec l’art contemporain est patente. Ainsi le Néerlandais Maarten Baas introduit des sortes de performances filmées dans certaines de ses pièces. Dans le même temps, de nouvelles technologies vont profondément faire évoluer les formes des objets. L’impression 3D apparue dans les années 1980 s’est, au départ, concentrée sur de petits objets, mais le développement de ces technologies avec des start-up très performantes vont permettre la réalisation de formes extrêmement complexes. Le designer Patrick Jouin en France ou Joris Laarman aux Pays-Bas se distinguent par l’usage de ces procédés.
Cabinet Settimio
Fernando (né en 1961) et Humberto (né en 1953) Campana
Italie, 2012
Bronze doré, bambou
H. : 230 cm - L. : 87 cm - Prof. : 75 cm
Achat grâce au mécénat de M. Placido Arango Jr., 2013
Ce cabinet s’inscrit dans une démarche singulière, celle des brésiliens Fernando et Humberto Campana qui œuvrent à la frontière du design, des arts appliqués et de l’art contemporain. Les deux frères conçoivent un design « tiré de la rue » avec, pour matériaux de prédilection, des objets de récupération, à priori étrangers à l’univers du design. Avec Settimio, ils travaillent toujours à partir d’éléments de récupération, mais ils introduisent de nouveaux matériaux comme le bambou et les éléments sont façonnés dans un atelier romain spécialisé dans le travail du bronze, selon la plus pure tradition des techniques artisanales d’orfèvrerie.
Cette table est emblématique des travaux menés par Jean-François Dingjian sur la façon de détourner des procédés industriels au profit de l’univers domestique. Elle est réalisée en carbure de silicium, un matériau utilisé en astronomie pour des instruments d’observation, comme les miroirs des satellites de grandes dimensions. C’est le matériau et le mode de production mêmes qui donnent naissance à l’objet. Partir des procédés de fabrication et des processus liés à la production industrielle est une tendance de plus en plus courante chez les designers de la génération de Jean-François Dingjian.
Chair_ONE fait partie des pièces de design qui, au début du XXIe siècle, se distinguent par l’emploi de matériaux inhabituels dans le domaine du mobilier. Chair_ONE est une pièce marquante par l’usage du béton, matériau de l’architecture. La recherche d’un langage formel renouvelé, mais aussi l’expérimentation de matériaux inédits ou de nouveaux procédés de fabrication sont l’apanage du travail de Konstantin Grcic.
Horloge Grandfather Clock
Marteen Baas (né en 1978)
Pays-Bas, 2009
MDF (Medium Density Fiberboard, placage de cerisier) verni, résine, vidéo
H. : 214 cm - L. : 70 cm - Prof. : 50 cm
Achat à l’artiste grâce au mécénat du Cercle Design 20/21, 2012
Real Time est une série de vidéos imaginée en 2009 mettant en scène des acteurs indiquant l’heure. Ici, le petit film tient lieu de cadran d’horloge, la vidéo montrant un homme actionnant lui-même les aiguilles de l’horloge. Le concept Real Time, dont fait partie Grandfather Clock, constitue une nouvelle étape dans le travail de Maarten Baas, désormais à la frontière entre design et performance. Il est caractéristique de cette voie nouvelle que prend le design dans les années 2000 : une conception du design s’ouvrant à d’autres disciplines et non plus spécifiquement tourné vers l’objet.
Suspension Vertigo
Constance Guisset (née en 1976) ; édition Petite Friture
La suspension Vertigo est un bel exemple des objets de design qui font le succès de maisons d’édition comme Petite Friture qui se développent vers 2010 et de leur collaboration avec de nombreux nouveaux talents du design. Cette suspension est également caractéristique des objets aériens, animés et accueillants imaginés par Constance Guisset.