Empire

Après le coup d’État du 18 Brumaire mettant fin au Directoire, Napoléon Bonaparte devient d’abord premier consul et ne cesse de renforcer son pouvoir et son rôle jusqu’à sa proclamation en tant qu’empereur. Le mobilier et le décor doivent être à l’image du pouvoir de Napoléon, toujours en quête d’apparat, comme en témoignent ses nombreux palais obéissant à une étiquette renouvelée.

« Pâris et Hélène »
Jacques-Louis David (1748-1825)
France, 1789
Huile sur toile
H. : 144 cm - L. : 174 cm
Legs Jacques Frédéric Eugène Lefebvre de Viefville, 1963
Inv. 38663
© MAD, Paris / Jean Tholance

Napoléon réinvestit alors les anciennes demeures royales dépouillées pendant la Révolution, qu’il remeuble tout au long de son règne, et génère ainsi une production de mobilier d’une grande variété. Le « style Empire » ne s’arrête pas strictement aux bornes chronologiques du règne impérial (1804-1815) mais apparaît dès la fin du XVIIIe siècle et perdure en partie sous la Restauration.

Contexte / influence

Le style Empire s’inscrit dans le mouvement néoclassique, à la suite des découvertes de Pompéi et d’Herculanum au XVIIIe siècle, caractérisé par un retour vers une plus grande simplicité des formes, et l’importance du « goût antique ». Les artistes tirent alors leur inspiration de monuments, figures ou objets grecs, étrusques, romains et égyptiens. Deux noms restent fortement associés à l’Empire : Charles Percier et Pierre Fontaine, à qui l’on doit un très grand nombre de projets décoratifs, et également un recueil de décorations, Recueil de décorations intérieures comprenant tout ce qui a rapport à l’ameublement [...], publié à Paris en1812, qui devient un ouvrage de référence pour tous les fabricants. La maison d’ébénisterie Jacob-Desmalter est l’un des principaux fournisseurs de la cour et incarne le style Empire. En effet, les industries de luxe, encouragées par l’Empire se développent considérablement, comme la manufacture de Sèvres par exemple. Le style Empire a une grande influence sur l’ensemble du continent et notamment en Angleterre, qui connaît un fort engouement pour les arts décoratifs français.

Modèle de bas-relief pour l’un des côtés de la nef de Napoléon
Service dit du Grand Vermeil
« Le Mariage de l’Empereur »
Henry Auguste (1759-1816)
1804
Cire, bronze patiné
H. totale (avec cadre) : 14,4 cm - L. : 35,5 cm - Prof. : 3,4 cm
Don David David-Weill, 1929
Inv. 26920.A
© MAD, Paris / Jean Tholance

Formes

Cabinet
Charles-Joseph Lemarchand (1759-1826)
Paris, 1805-1810
Bâti en chêne, intérieur en cèdre, placage en acajou de Cuba moucheté, bronze doré, tablette en marbre, glace
L. : 91,5 cm - H. : 130 cm - Prof. : 55 cm
Dépôt du Ministère de la Guerre, 1909
Inv. ARMEE 2007.2.104
© MAD, Paris / Jean Tholance

Les formes sont simples, symétriques, et inspirées de l’architecture et du mobilier grecs et romains. Le dessin est rectiligne, et les surfaces planes prennent de l’importance, permettant l’ajout en applique d’éléments de bronze doré, variés et parfois en très grand nombre. Le style Empire généralise l’emploi du socle et non de pieds pour le mobilier tel que la commode ou le secrétaire qui devient massif et cubique. La ronde-bosse et l’usage du bois sculpté représentant des figures humaines ou animales, caractéristiques du style Consulat, sont peu à peu délaissés.

Ornements

Papier peint à motif répétitif
France, 1805-1810
Papier rabouté, fond brossé à la main bleu, lissage, impression à la planche de bois 11 couleurs, gaufrage
Inv. 2009.3.622
© MAD, Paris / Jean Tholance

Le style Empire voit cohabiter des formes puisées dans des éléments architecturaux issus de l’Antiquité (chapiteaux, pilastres, frises) ou encore des ornements végétaux comme les palmettes, rosaces, branches de laurier, feuilles d’acanthe, etc. Le mobilier impérial est doté de motifs symboliques liés à la gloire, au pouvoir ou à la guerre : le bouclier, le trophée militaire ainsi que l’aigle et l’abeille.

Matériaux

L’acajou et d’autres bois exotiques sont encore très employés pour le style Empire, bien que l’utilisation du bois « français » ou indigène soit encouragée par le pouvoir, notamment pour des raisons économiques, à partir de 1811. Néanmoins, le bois doré est toujours employé pour le mobilier d’apparat. Les tapissiers jouent un rôle très important à cette époque, et le mobilier et les décors intérieurs utilisent les tissus les plus riches et variés : le damas et le brocard. L’industrie de la soie, notamment à Lyon, connait un nouvel élan sous l’Empire.

Lit « bateau »
France, premier Empire (1804-1814)
Acajou, bronze doré
H. : 109 cm - Prof. : 112 cm - L. : 182cm
Don Mademoiselle Fournier, 1904
Inv. 11187
© MAD, Paris / Jean Tholance

Invention / création (meubles nouveaux)

Psyché
Buteux, ébéniste
France, vers 1814
Acajou, bronze doré, glace
H. : 180 cm - l. : 95 cm
Legs Max Beulé, 1918
Inv. 20861
© MAD, Paris / Jean Tholance

Plusieurs meubles font leur apparition à cette époque. Le somno qui est une petite table de nuit, le plus souvent de forme cubique, ressemble à un secrétaire de petites dimensions dans lequel est placé un pot de chambre. La psyché, avec notamment l’utilisation de montants en colonne comme sur un grand nombre de meubles, connaît un certain succès. L’athénienne, très en vogue également dans ces années, est le meuble le plus « antiquisant » avec sa forme en trépied. Percier et Fontaine proposent de nombreux modèles dans leur recueil. Enfin, les typologies se modifient également, comme on le remarque avec la méridienne à dossiers inégaux ou la forme « gondole » avec sa ligne courbe, se multiplie sur les sièges et les lits qui en portent alors le nom.

  • Somno

    France, vers 1805
    Bâti en chêne et bois résineux, acajou ronceux plaqué, intérieur en bois résineux teinté rouge, bronze doré, marbre blanc
    H. : 82.50 cm - L. : 39.50 cm - Prof. : 32.50 cm
    Legs Alexandrine Dècle, 1898
    Inv. 8586
    © MAD, Paris / Jean Tholance

    Le « somno », signifiant « pour le sommeil » en latin, est un meuble nouvellement apparu sous l’Empire. Il désigne une forme particulière de table de nuit ou de chevet. Plaqué d’acajou et surmonté d’une tablette en marbre pouvant recevoir le verre d’eau de la nuit, celui-ci emprunte sa forme à un autel antique. Derrière une porte, se trouvent deux étagères pouvant accueillir le pot de chambre. L’application d’ornements en bronze doré, une torche – symbole de la nuit – entourée d’une couronne de laurier sur ce bois sombre, est caractéristique du style Empire. Sur des roulettes, il est facilement déplaçable pour être disposé autour du lit.

  • Table à écrire

    Atribué à Bernard Molitor
    Paris, époque Consulat (1799-1804)
    Bâti en chêne, acajou, bronze doré, plateau garni de cuir, intérieur du tiroir en citronnier
    H. : 71 cm - L. : 97 cm - Ép. : 57 cm
    Legs Louise Lefebvre de Viefville au nom de Monsieur Louis Lefebvre de Viefville, 1964
    Inv. 38624
    © MAD, Paris / Jean Tholance

    Cette élégante table à écrire possède toutes les caractéristiques du style Empire par la sobriété de ses lignes et les ornements en bronze doré finement ciselés, contrastant sur l’acajou brillant, bois qui fit la réputation de Bernard Molitor. Les ornements puisent dans le vocabulaire végétal : les larges pieds accueillent de grande palme, une couronne de feuilles de chêne est appliquée sur la ceinture et une rosace orne la serrure. Molitor fut l’un des rares ébénistes dont l’activité a prospéré avant comme après la Révolution.

  • Fauteuil

    François-Honoré-Georges Jacob-Desmalter (1770-1841)
    Paris, vers 1800/1805
    Acajou, traverse en hêtre plaqué d’acajou
    H. : 95 cm - L. : 65 cm - Prof. : 56 cm
    Don Mademoiselle Fournier, 1904
    Inv. 11605
    © MAD, Paris / Jean Tholance

    Ce fauteuil à devant cintré présente deux pieds antérieurs en gaine reposant sur le sol par une patte de lion. Les pieds se prolongent et les têtes sculptées de sphinge portant la coiffure égyptienne du némès forment les accotoirs. Ceux-ci se rattachent au dossier carré par une fleur de lotus. Cette thématique décorative, à la mode en cette période napoléonienne que l’on nomme « retour d’Égypte », est typique du répertoire néoclassique empreint de références à l’Antiquité. Les architectes Percier et Fontaine vont jouer un rôle important dans le développement et la diffusion de ce style.

  • Pendule au cygne

    Paris, vers 1810
    Bronze doré
    H. : 41 cm - L. : 27 cm - Prof. : 12 cm
    Don André Jacquart, 2009
    Inv. 2009.87.11
    © MAD, Paris / Jean Tholance

    Entièrement fabriqué en bronze doré, le cygne aux ailes déployées porte sur son flanc le cadran et se hisse sur un socle au centre duquel se trouve l’aigle impérial. Le cygne, l’un des attributs d’Apollon, est un motif récurrent de cette période : les accotoirs des fauteuils prennent la forme de col de cygne et ces derniers deviennent des supports de guéridon. Le cygne peut également être interprété comme un symbole de beauté.

  • Candélabres « Mars » et « Minerve »

    France, époque Premier Empire (1804-1814)
    Bronze patiné, bronze doré
    H. : 101 cm - L. : 25 cm - Prof. : 19 cm
    Legs de M. Maurice Darlu
    Inv. 27446.A-B
    © MAD, Paris / Jean Tholance

    Chaque candélabre est composé d’un pied hexagonal richement ornementé d’appliques en bronze doré sur lequel se tient une divinité de la mythologie romaine en bronze patiné : Mars reconnaissable à son armure et Minerve à son bouclier orné de la tête de Méduse. Quant à la lance qui est également un attribut des deux divinités, elle est ici transformée en bras de lumière à six bobèches. Le contraste entre les figures noires et les éléments dorés que permet la double patine est très répandu sous l’Empire.